Vivre le sauvage par Mélanie Petit

Les mots de Mélanie sont envoûtants, emplis de poésie, de magie et suscitent beaucoup d’émotions. Je retrouve dans cette interview la Mélanie que j’apprends à connaître à travers nos échanges, ses photos et textes de sensibilisation.

Une grande sensibilité, témoin du sauvage et de cette société qui court à la perte des trésors de notre Terre. Cette envie d’évasion et de crier que la beauté se trouve si proche et que sa destruction est bien trop avancée. L’univers magnifique de Mélanie est riche d’enseignements et saura vous transporter !

Bonne lecture ! 🥰 N’oubliez pas de lui laisser un petit mot en commentaire et à suivre son travail (lien en bas de l’article).

Mélanie Petit, photographe animalière


Je m’appelle Mélanie  j’ai 28 ans et je suis Mosellane, dans le Grand Est depuis toujours ! Petite âme hypersensible, trop émotive et ne trouvant pas facilement sa place au sein du monde des humains.. De part une scolarité difficile, un besoin constant d’évasion, de rêve et de la tournure actuelle du monde de plus en plus triste pour le vivant.. Éternelle amoureuse et passionnée des animaux, du calme et de la beauté, c’est une évidence pour moi de faire de la nature ma vie, tout simplement.

 Ma vie scolaire n’a pas été de tout repos. Victime de harcèlement scolaire au lycée, c’est assez rapidement que la seule solution de me sortir d’une dépression a été de quitter l’école et de me lancer dans le monde du travail. À cette période déjà, et plus que jamais, la nature et les animaux seront une véritable thérapie et une façon pour moi de pouvoir tenir bon. Cela a été également la raison pour laquelle le harcèlement a commencé, la différence dérange.

J’ai ensuite découvert les enfants, qui portent en eux, bien souvent cette innocence et cette sincérité qui représentent les animaux. Je suis actuellement animatrice en école maternelle et élémentaire. Et j’ai pour projet de devenir Animateur nature afin de transmettre ma passion et former les futures générations aux causes qu’ils devront défendre.

Pourquoi la photographie animalière ?

Je dirais qu’à mes débuts, j’ai voulu m’essayer à la photographe animalière car il y avait quelque chose de vraiment incroyable et enfantin quant à l’idée de pouvoir créer des images d’un sujet sauvage, peut être que j’y voyais aussi un challenge..

Je savais que cela ne serait pas facile. Et évidemment, cela me donnait encore une raison de plus de passer tout mon temps dehors..

Puis les semaines et les mois se sont écoulés.. Et petit à petit, la photographie animalière est devenue bien plus que ça. Quelque chose s’est totalement bouleversé en moi… Il m’est encore difficile de mettre des mots sur ce que je ressens et sur ce que cela m’apporte.

Je crois pouvoir dire aujourd’hui, sans peser mes mots, que j’ai enfin trouvé qui j’étais, et la raison pour laquelle j’ai une place dans ce monde. Le contact avec la vie sauvage est totalement viscéral, cela fait partie de moi, et je ne me vois plus vivre sans.. Cela fait maintenant tout juste 1 an. Je ne sais pas du tout où cela me mènera, je n’y pense pas.. Le seul objectif réel que j’ai, c’est de continuer à me sentir vivre, et m’orienter autant que possible vers une vie au plus proche de la nature pour y consacrer chaque minute de mon temps libre.

J’ai envie de dire au monde, REGARDEZ.. Rendez vous compte de la beauté exceptionnelle de notre Terre sauvage, des ces trésors et aimez là, elle le mérite tellement..

La Nature perdurera toujours.. Sa force est magique. Mais nous, nous devrions regretter d’être en train de détruire ce qu’elle nous offre pour vivre. 

Que t’apporte cette merveilleuse passion ?

La vie…

Respirer, ressentir, écouter..

Elle m’aide à grandir, à devenir une personne meilleure.

Elle me rappelle quelles sont nos valeurs oubliées.

Elle me remet souvent à ma place, me donnant des leçons lorsque la patience ou l’humilité me font défaut.

Elle m’oblige à sortir de ma zone de confort, à dépasser mes limites physiques et mentales.

Elle m’apprend à apprendre, à réfléchir..

Il y a tant de choses à dire, mais simplement c’est que du bonheur, voilà tout. 

As-tu une idée du temps passé sur le terrain ?

Lorsque je ne travaille pas, j’essaie toujours de m’organiser pour partir à l’aube et rentrer au crépuscule en partant avec un sac à dos et mon matériel photo.. Difficile de donner exactement le temps en fonction des saisons cela change beaucoup. J’y consacre mes week ends, mes congés, et parfois mes pauses au travail.

Quelles sont les difficultés que l’on peut rencontrer ?

À mes yeux, la plus grosse difficulté restera l’insécurité face à la chasse. Surtout en période de battues..

Les conditions météo peuvent l’être aussi, mais personnellement cela fait partie du jeu et j’ai besoin d’affronter les conditions hivernales pour me sentir vivante, de plus en plus !

Enfin je dirais le manque de temps… Ce qui empêche souvent de poursuivre des suivis, des pistages etc.. (Bon et peut-être les tiques, les chenilles urticantes et les moustiques… ^^)

Que penses-tu de l’éthique en photographie animalière et quelle est ton éthique, ton exigence lors de tes sorties photos ?

Question existentielle..

On pourrait en parler des heures malheureusement, alors qu’elle ne devrait finalement même pas se poser car le respect devrait être quelque chose d’évident et de normal.

De manière générale je crois qu’il faut surtout ne pas porter atteinte et ne pas intervenir dans le milieu (aménagement, etc) ni auprès de l’animal (appât, etc) ..

Plus précisément, savoir se priver quand c’est nécessaire surtout aux périodes sensibles, à moins d’être certain de prendre des précautions qui ont étaient travaillées en amont.

Bien que le risque zéro n’existe pas (faire fuir au terrier, nidification, etc..)

Il ne faut tout de même pas trop culpabiliser lorsque dérangement il y a, de façon imprévu comme cela arrive souvent (repérage ou fuite d’un animal par exemple), car la nature et l’homme cohabitent de toute façon que ce soit photographes, promeneurs ou autres.. Il faut se former, se remettre en question constamment pour améliorer son affût, son camouflage ou son approche.

Savoir s’arrêter, et accepter l’invisible et surtout laisser la nature décider.

Quelle est ton approche lors d’une sortie photo ?

Je dirais qu’aucune sortie, aucun affût, ni aucune rencontre ne se ressemblent..

Je suis une grande fan de l’affût, attendre l’invisible, l’imaginer pendant des heures, avoir tous les sens en éveil. Puis, parfois, avoir le cœur qui s’emballe lorsque le moment tant attendu arrive.

Pour moi c’est réellement l’approche qui permet de s’immiscer de façon la plus intime au cœur de leur quotidien.

Néanmoins, parfois je pratique la billebaude lorsque la situation, ma patience, et les énergies sont connectées !

Évidemment, les repérages en amont sont une grande partie de mon temps dans la nature. Car sans ça, pas d’observations !

Je pense que je m’adapte vraiment à chaque animal, et à chaque histoire qu’il y a derrière une envie de photographier.

Peux-tu nous raconter ta plus belle rencontre animalière ?

J’ai presque l’impression de ne pas rendre hommage à chaque regard que j’ai croisé, du plus petit oiseau au plus grand mammifères, en ne choisissant qu’une rencontre..

Chacune d’entre elles a construit quelque chose en moi pour toujours.

Je peux parler de trois rencontres qui ont étaient vraiment particulières.. 

La première sera celle de mon tout premier face à face avec un renard que j’ai cherché pendant des mois, dont je désespérais vraiment de trouver le territoire. Un moment inoubliable d’avoir enfin pu mettre une bouille sur tant d’espoirs.. 

La deuxième mon premier moment au cœur de l’intimité des cerfs accompagné de mon ami « wildlife_by_olivh » nous avions déjà fait de très nombreux jours et heures de billebaude infructueuses en espérant les croiser. Ce sera un soir d’été durant presque 20 minutes que nous pourrons les observer à quelques mètres sans qu’ils ne se doutent de notre présence…

Et enfin, ma rencontre avec les phoques gris et les veaux marins en Bai de Somme, qui m’aura totalement émue aux larmes tant ils ont de tendresse dans leurs yeux, tant ils sont expressifs et tant la beauté de l’océan était puissante. 

Quelles sont les espèces que tu rêverais de photographier et pourquoi ? / Quel est ton plus grand rêve en tant que photographe ?

Ah les rêves.. J’en ai plein.. C’est ce qui me permet de m’évader, de déconnecter de ce monde de brut..

De plus en plus je voue un intérêt aux animaux nordiques, tel que le bœuf musqué, le renard polaire, les élans. La faune de l’Islande et de la Gaspésie m’émerveille aussi…

Enfin c’est tellement difficile de se restreindre lorsqu’on voit les milliers de beauté de notre monde.

Je crois, que, comme beaucoup de photographes je rêve également de voir des grands prédateurs en France.. Pour le respect et l’engagement que j’ai auprès d’eux, pour les protéger et faire entendre qu’ils sont la solution à l’équilibre de la faune sauvage.

Mon rêve de façon plus générale c’est simplement de pouvoir continuer ma passion le plus longtemps possible

Quels/quelles sont les photographes qui t’inspirent et pourquoi ?

Sans hésitation, Vincent Munier.. Pour les émotions qu’il partage à travers ses images et ses films, son art, sa façon de voir la photographie de façon personnelle loin des codes. Et pour la personne humble et humaine qu’il est.

Mais de nombreux photographes m’inspirent au quotidien ! Éric Deschamps est un photographe et une personne qui mérite vraiment d’être suivie, l’amour et le respect qu’il a pour la nature et la vie sauvage est très émouvante. Et ses photos sont incroyables !!! 

J’admire aussi beaucoup le travail et la sensibilité de Charline Palomares.

 Que penses-tu des retouches en photo ?

D’un point de vue personnel, elle est primordial pour habiller mes images des émotions que j’ai vécue sur le moment.

Elle peut aussi aider à raconter une histoire..

Parfois je pousse un peu plus que d’autres, tout dépend aussi des conditions dans lesquelles j’ai déclenché. Je crois que chacun est libre de retoucher ou non, l’important restant essentiellement de ne pas déranger l’animal !

Quelle est la photo dont tu es la plus fière? 

 Je pense que ces trois images, sont celles dont je suis la plus fière. Non pas d’un point de vue technique ou artistique. Mais simplement car elles représentent un moment de vie que j’ai pu figer pour toujours, et surtout car ce sont trois affûts où j’ai été totalement invisible aux yeux des animaux malgré la grande proximité.

As-tu d’autres domaines qui t’intéressent en photos et/ou d’autres passions ?

Oui, j’aimerais beaucoup pouvoir me mettre et progresser en photographie de paysage, je trouve que c’est une discipline extrêmement difficile à réaliser.

Des émotions fortes peuvent être transmises, des messages engagés aussi.

Aussi, la macrophotographie m’intéresse beaucoup, j’espère pouvoir investir prochainement dans du matériel adapté !

Sinon, la randonnée, le dessin et les arts plastiques sont mes autres passe-temps.

Quels conseils donnerais-tu aux photographes animaliers qui débutent ?

La première chose, et la plus importante à mes yeux, est déjà de se demander et de savoir pourquoi choisir la photographie animalière d’animaux sauvage, quelles sont réellement les attentes et les intentions.

Se poser des questions, est-ce que je serais capable de faire preuve de patience, accepter la frustration, l’invisible.. Car c’est surtout ça finalement notre quotidien, ne rien voir..

Ensuite il est absolument essentiel d’apprendre ! C’est la base de toute la potentielle réussite d’une observation et ensuite d’une image (qui reste toujours une option et non une obligation).

Apprendre sur l’affût, comment le mettre en place, le vent, le camouflage… Car je pense qu’au départ, il doit être préféré à l’approche tant que le secteur, l’animal et les techniques ne sont pas un minimum acquises.

Et apprendre sur la nature et sur le sujet, par les livres, des documentaires, des échanges. Même si on apprend tous les jours, sur le terrain par l’observation. Prenez le temps.. Ne soyez pas pressé(e), les récompenses dans la nature se mérite ! 

Enfin il faut garder en tête l’éthique et la passion.. Ne pas se laisser entraîner par la gloire virtuelle des réseaux sociaux. La vraie vie se trouve dehors !

Et de ma propre expérience, les oiseaux sont un super sujet d’entraînement pour la mise au point, les réglages etc !

Quels sont tes projets, ton actualité, tes prochains challenges photo ?

Pour le moment j’ai des rêves et des projets plein la tête…

J’aimerais vraiment voyager en France afin de pouvoir y observer toute la faune sauvage et admirer les paysages.

À plus court terme, je voudrais pouvoir effectuer un suivi sur une famille de Blaireaux cet été.

Suivre aussi un couple de Pics noirs, observer des rapaces nocturnes dont la Chouette Hulotte et une famille de Martins Pêcheurs.

Et mettre en lumière le Sanglier. J’espère aussi pouvoir retourner sur les traces du Lynx dont j’ai pu voir les indices de présence.

Mais globalement, il y a vraiment beaucoup d’espèces que j’envisage d’observer.. Le Castor, la Panure à moustache, le Pyguarge à queue blanche, le Daim, le Raton laveur… Notre faune est vraiment incroyable !!

Un petit mot pour la fin de l’interview ?

Je tiens déjà à te remercier de m’avoir laissé la parole, c’est super de pouvoir échanger son point de vue sur ces sujets.


Enfin, je voudrais juste dire une fois de plus à quel point la nature et la vie sauvage sont importantes et méritent d’être aimées et respectées..

Protégeons et préservons ce vivant d’une beauté infini, montrons ce monde oublié pour émerveiller les consciences et espérer le nouveau monde de demain.

Suivez Mélanie Petit :

Plus d’articles à lire :

(2 commentaires)

Répondre à paroledeleaphotographie Annuler la réponse.